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Le canal Saint-Tropez

Préambule

Quand on sort de la ville de Sisteron en direction du nord et que l’on traverse le pont de la Baume en empruntant la D 951 pour se diriger vers Valernes et la vallée de la Sasse, on côtoie et traverse en quelques endroits un large fossé rempli d’eau en été et asséché en hiver. Les habitants le nomment le canal de Saint-Tropez. La curiosité nous a amenés à consulter livres et revues pour en connaître davantage. Rien dans les bulletins de la Société Scientifique et Littéraire de Digne, rien non plus dans les livres concernant la Provence. Ce n’est qu’avec Edouard de Laplane en 1843 que deux petites pages fournissent enfin quelques informations [1]. L’auteur rappelle d’abord en note le projet d’un canal d’arrosage en 1724 prenant l’eau dans le Buech qui ne sera pas réalisé. Puis il donne un bref résumé de l’initiative d’un autre canal qui devrait fertiliser le quartier de la Baume (1777). La prise d’eau est faite dans le territoire de Châteaufort. 30 000 livres sont fournis par moitié par la ville de Sisteron et la province pour commencer l’exécution du canal et un règlement de police est rédigé le 5 avril 1779, dont le premier article stipule que le canal projeté sera appelé, sous le bon plaisir de M. de Suffren de Saint-Tropez, seigneur évêque de Sisteron, qui a bien voulu contribuer par ses bons offices à sa construction, le canal Saint-Tropez, en perpétuelle mémoire et reconnaissance des bontés de cet illustre prélat.

Ces brèves indications nous ont amenés à consulter les archives départementales. Un dossier fait état des réparations exécutées au canal au cours des XIXe et XXe siècles [2]. Parmi les documents un texte de la fin du XVIIIe siècle, non daté, relate que ce canal fut commencé en 1780. M. de Suffren, ancien évêque de Sisteron en fut l’auteur. Il a coûté 90.000 f., les Etats de Provence y ont contribué pour 30,000 f. Sa longueur est d’environ deux lieues. Sa prise dans le torrent de Sasse est assurée par une position favorable. Il traverse plusieurs vallons et ravins dans son cours qui ont nécessité 50 à 60 ouvrages d’art plus ou moins considérables. Il arrose dans le terroir de Sisteron, sur une lieue de longueur, un espace de demi-lieue de large. Figure également un article du journal La Marseillaise du 16 avril 1948 avec la photo d’un pont-aqueduc en reconstruction : le canal Saint-Tropez, un des plus importants et des plus anciens du département des Basses-Alpes, dont l’origine remonte à 1774, apporte les bienfaits de l’irrigation sur les territoires des communes de Valernes et de Sisteron, dont il est l’une des principales sources de fertilité. Sa longueur de 14 kilomètres, comporte de nombreux et très importants ouvrages d’art, tous en délabrement. L’auteur de l’article donne ensuite les noms des principaux ingénieurs du Génie rural qui ont participé à l’œuvre de restauration du canal.

Malheureusement ce dossier ne contenait aucun document sur l’origine du canal. Il fallait donc aller voir ailleurs. La bibliothèque municipale de Sisteron sert également de réserve et de consultation des archives de la ville de Sisteron. On y trouve les registres des délibérations municipales et treize dossiers concernant le canal [3] . Parallèlement, suite à la consultation des registres, il fallut retourner aux archives départementales consulter les actes notariés du notaire Mieulle de Sisteron chargé de consigner les différentes conventions et accords passés en 1779 et 1780 [4] .

On constate déjà avec les trois premiers textes des divergences notables. Laplane reconnaît seulement les bons offices de l’évêque, alors que le deuxième texte affirme que l’évêque fut l’auteur du canal. Laplane avance la date de 1777, puis on a 1780 et enfin 1774.

Pont sur le canal, près du captage, dans la vallée du Sasse. Vue amont.
Pont sur le canal, près du captage, dans la vallée du Sasse. Vue amont.
Pont sur le canal, près du captage, dans la vallée du Sasse. Vue aval.
Pont sur le canal, près du captage, dans la vallée du Sasse. Vue aval.

Renvois-Notes:

[1]   LAPLANE Edouard de, Histoire de Sisteron (2 volumes), Digne, 1843 (Laffitte, 1974), p.336-338.

[2]   AD AHP, S 841.

[3]   Délibérations BB 191 et 192. Dossier III O, principalement les articles 3 à 13. Contient essentiellement des comptes de trésorerie concernant les adhérents du canal.

[4] AD AHP, 2 E 14000.